Le jeu pratiqué en TOP14 semble handicaper le XV de France dans ses confrontations avec le sud. Comment en est-on arrivé là ?
Tout d’abord il semble juste de rappeler
une bonne grosse lapalissade : si un jeu restrictif est pratiqué en TOP14,
ce n’est pas parce que les entraineurs/managers n’aiment pas les passes et les
grandes envolées ! Ce n’est pas non plus une demande des présidents :
eux ils veulent des gens au stade, c’est ce qui rapporte de l’argent au club,
ils n’ont aucun intérêt à exiger 80 minutes par semaine de pick-and-go ou de
jeu à une passe sèche.
Non, c’est parce que ce type de jeu
apparait d’une part moins risqué, il permet d’exister contre un adverse jugé
plus fort, et d’autre part, depuis des années, il apporte des garanties en
terme de résultats à tous ceux qui l’ont (« brillamment… » ?)
pratiqué.
Et ne comptons pas sur les supporters des
clubs qui gagnent des trophées pour qu’ils déplorent la façon dont ils sont
gagnés. Ça ne marchera pas, et c’est, osons le dire, normal. Sauf que pour un
club qui gagne, il y en a 13 qui ne gagnent pas, et il y a des milliers de
personnes qui se détournent d’un sport qui ne fait rêver que les vrais
passionnés… et encore.... Et si CANAL+ ne vend plus ses matchs, alors l’ensemble
de la filière va se retrouver en difficulté.
En l’occurrence les matchs de barrages et
demi-finales 2017 ont semble-t-il atteint des sommets en terme de rudesse,
d’ennui, et in-fine de désintérêt…
Le rugby qui gagne, le rugby qui rapporte, le rugby qui attire… et la gestion des risques.
Le sud, et c’est nouveau, même les
sud-africains, nous montrent à longueur d’année que le rugby qui gagne n’est
pas celui du nord. Etonnamment, il est encore nécessaire de nous rappeler que
le rugby est un jeu d’intelligence, de prises de décisions, de vitesse et
d’évitement. C’est dingue, mais apparemment dans le nord plusieurs piqures de
rappel sont nécessaires… enfin… pas pour tous les nordistes…
Sauf qu’en France le jeu pratiqué est
aussi la conséquence des choix passés : si on ne sélectionne parmi nos
jeunes que des joueurs forts dans le rentre dedans… si on ne recrute que de
solides gaillards qui rentrent dans la meule… Si on continue à sélectionner les
joueurs compatibles avec la pratique du « haut niveau » avec une
toise et une balance… Ben il ne faut pas s’étonner qu’ensuite on se retrouve
avec 14 équipes d’auto-tamponneuses qui font ce qu’elles savent faire :
une passe et pan !
Il ne faut pas se leurrer : ce jeu
fait de lenteur et de percussions, n’est pas un choix des coachs, pas
seulement, c’est surtout une conséquence tragique des errements de la détection
« à la française », de la religion du « morpho-type » qui
prévaut encore dans la détection française.
Enfin il faudra régler un jour ce
problème de la prise de risque. Pour cela il n’y a qu’une solution :
couper définitivement le cordon ombilical entre le rugby amateur et le rugby
pro. La fédérale 1 doit cesser d’être la 3ème division, 4ème
à certains égards. Elle doit redevenir ce qu’elle est profondément : la
première division… amateur, certes, mais la première division quand même. Le
TOP14 et la PROD2, c’est un autre monde auquel on peut accéder sur dossier,
mais certainement pas sur le terrain. Parce que quand tu es champion de France
de première division, au-dessus, il n’y a rien.
De la même façon il ne peut plus être
possible de descendre de PROD2 compte tenu de ses résultats sportifs. Non. On
rejoint la PROD2, on n’y monte pas, et on quitte la PROD2, on ne descend pas.
J’imagine que certains présidents de
clubs, si on leur disait qu’ils pouvaient finir derniers sans risque,
aligneraient bien en PROD2 35 joueurs français de 20 à 25 ans. Ah ok, pendant 2
ou 3 ans ils finiraient peut être derniers… Mais après ?
Ça se tenterait non ?